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LEON HENNIAUX : RESISTANT ET BIENFAITEUR

La « tourette » restaurée grâce à la générosité d’un gamin de Forest

 

Le 8 mai dernier, de nombreux Forésiens se sont rassemblés pour fêter la renaissance de la tour, appelée communément la « Tourette » et inaugurer le square Léon Henniaux.

Au Moyen-Age, on avait l'habitude d'entourer les églises de fortifications et de fossés.

La construction de celle de Forest remonte à la fin du XIIe siècle. Le Fort qui l’entourait offrait un abri et un rempart à la population en cas d’attaques ennemies. Et, elles furent nombreuses ! Ce Fort se composait de quatre tours, reliées entre-elles par un mur et le tout englobait également l'ancien cimetière. A l’origine, un fossé était creusé autour des fortifications et des souterrains permettaient aux femmes et aux enfants de se déplacer de l’église vers les tours. A l’intérieur, un puits alimentait la population en eau.

A la première alerte, les habitants abandonnaient leurs maisons, se réfugiaient dans le Fort, avec leurs animaux et tout ce qu'ils avaient de plus précieux. C'était sous les yeux de leurs épouses et de leurs enfants, sur les tombeaux de leurs aïeux, que nos ancêtres repoussaient l'ennemi.

Ce Fort eut également une réelle importance pendant les guerres du XVIe siècle, puis avec la modernisation des armements, son utilité cessa progressivement.

 

Aujourd’hui, la tourette, dernier vestige des fortifications, est le symbole du patriotisme et de l’esprit de résistance des Forésiens. Elle est le témoin de tous les sacrifices consentis pour la défense de leur commune lors des très nombreux conflits meurtriers qui ont eu lieu au cours des siècles passés.

Les trois autres tours, le mur d’enceinte, le fossé, victimes des ans, des intempéries et d’un certain laisser-aller, disparurent progressivement, dans l’indifférence générale.

Cette dernière faillit également être emportée par le temps. Elle fut décapitée en 1978 par un ouragan mais fut sauvée par l’intervention de l’actuelle municipalité. Un premier travail de consolidation a demandé plusieurs mois ; il fut réalisé par les employés communaux.

 

 

Le monument était sauvé mais sa restauration complète n’était pas encore programmée, faute de moyens financiers. Le dernier acte de ce sauvetage fut écrit, en juin dernier, par un « gamin de Forest ».

C’est ainsi que Léon Henniaux aimait se rebaptiser. Léon est né et a grandi de l’autre côté de la Chaussée, à quelques dizaines de mètres de cette tour. Il la connaissait bien : il a joué autour, il a vu disparaître les autres.

Léon parlait souvent de son enfance heureuse à Forest ; par contre, il restait plus discret sur son passé pourtant héroïque pendant la guerre 39-45. En 1943, il est entré en résistance avec le réseau OCM, sous les ordres du Dr Roger Robert de Landrecies, son collègue vétérinaire. Il est arrêté dans la soirée du 7 janvier 1944. Il est emmené à la caserne Clarke, il y restera 54 heures sans manger ni dormir. Puis il est dirigé vers la prison de Loos. Là, il retrouve Roger Robert, arrêté à la ferme Godard. Ils sont enfermés dans une cellule à six, prévue pour une seule personne. « Il y avait un copain communiste et un curé » raconte-t-il. Ensuite, interrogé dans les bureaux de la Gestapo à la Madeleine, il est placé dans une pièce d'un mètre et demi de hauteur où il lui est impossible de se tenir debout. Les interrogatoires sont ponctués de coups de nerf de bœuf. Léon refuse de donner le nom de ses camarades. Puis il est transféré au bagne de Waldheim. Enfin, il arrive à Buchenwald en décembre 1944.

Léon décrit son nouvel environnement en ces termes : « Les baraques sont alignées le long des allées. Je remarque aussi une tour, c'est de là qu'on appelle le matricule de ceux qui vont être exécutés. Je vois des cadavres ambulants qui se traînent dans les allées du camp. Je vois chaque matin des morts empilés tels des bûches devant le bloc. Le tas monte jusqu'aux fenêtres ! À mon arrivée, je suis affecté à la grande carrière. Je dois extraire des pierres puis les transporter sur mon épaule jusqu'à un wagon tiré par 6 ou 8 détenus... ».

Le 11 avril 1945, les blindés américains arrivent à Buchenwald et libèrent le camp. Ils sont horrifiés par le spectacle de tous ces cadavres.

Léon est élu conseiller municipal en 1945, sans être candidat. Il est alors sur le chemin du retour de déportation.

Après cet épisode douloureux, Léon reprend son métier de vétérinaire à Avesnes mais il n’oublie pas son petit village natal. Il revient fréquemment à Forest rendre visite à sa famille mais aussi à ses anciens camarades. Il connait tous les Forésiens de souche, il adore les rencontrer, échanger quelques paroles dans le patois local. Il évoque souvent sa vie d’écolier dans la classe de Melle Amélie ou dans celle de M. Sautière, deux instituteurs qui ont marqué sa jeunesse. Il est intarissable quand il retrace des moments de son enfance : les glissades sur l’abreuvoir gelé, les jeux sur les ruines de l’église démolie ou encore l’enfermement d’un individu éméché dans cette tourette.

Léon avait une admiration pour deux Forésiens célèbres : l’Abbé Poulet,auteur de l’« Histoire de Forest » et Achille Payen, ancien maire, qui a protégé ses administrés pendant la guerre 14-18.

L’année dernière, les liens que Léon entretenait avec sa commune natale se sont resserrés davantage encore. Après la reconstruction de la chapelle bleue, il demanda que soit établi, pour la fin de la journée, un devis pour la réfection de la tourette et un autre pour la charpente et la toiture. Deux entrepreneurs ont accepté le défi et le soir-même, le sort de la tourette en était jeté : elle allait revivre grâce à la générosité d’un « gamin de Forest ».

Léon Henniaux est décédé le 7 décembre 2012. Par son passé patriotique et par l’attachement qu’il a porté à son village, il est devenu un grand Forésien.

Maurice Saniez