Viaude, trois ans, « un membre à part entière de la famille »

Pas besoin de hausser la voix. Objet de toutes les attentions, hier midi, Viaude, la femelle labrador chocolat âgée de trois ans, pousse quelques gémissements, tire un peu sur la laisse. Marie-Noëlle n'a que quelques mots à dire pour que l'animal s'apaise. Le fruit d'une relation savamment construite, au fil du temps, entre le chien guide et sa maîtresse, avec l'aide du centre Paul-Corteville de Roncq.

Comme tout chien guide d'aveugle, Viaude a passé la première année de sa vie dans une famille d'accueil, avant d'être prise en charge par une éducatrice. Elle est déjà associée à Marie-Noëlle Vinchon. La « remise » officielle ne s'est effectuée qu'hier, mais « on ne propose jamais un parrainage de chien guide quand l'équipe n'est pas faite », explique Josiane Couteau, du centre Paul-Corteville. Il faut laisser au binôme le temps de s'apprivoiser, histoire de voir si la « sauce » prend, même si c'est le cas la plupart du temps.

Et entre Marie-Noëlle et Viaude, tout s'est très bien passé. « Quand on a le chien, se souvient Mme Vinchon, il a déjà tout son vocabulaire, ses mots, ses gestes tout cela, c'est acquis. Après, c'est à moi d'apprendre avec le chien. » Une partie du travail s'est effectuée au centre de Roncq, une autre dans le village de Marie-Noëlle, Forest-en-Cambrésis. Au final, s'est créée « une relation très forte... Viaude est un membre à part entière de la famille », atteste Marie-Noëlle. Qui décrit tendrement sa chienne : « Elle est très vive, mais elle est câline. Quand je suis dans le fauteuil, elle se couche sur mes pieds... » Viaude est le deuxième chien de Marie-Noëlle, qui a perdu la vue il y a quinze ans à cause d'un médicament prescrit après une greffe du rein. « J'ai attendu quatre ans avant d'avoir un chien. Ça change complètement la vie. » Ne serait-ce que vis-à-vis des villageois qui « n'osaient plus » lui parler : « Les gens ont peur de la cécité... On pense que puisque je ne vois plus, je suis différente... Je suis différente, mais je suis toujours moi ! », soupire Mme Vinchon, qui reconnaît le pouvoir décisif du chien guide pour recréer le contact.

Sans compter qu'avec Viaude, et avant elle Poésie, au bout de la laisse, « on part quand on veut, on n'a besoin de demander à personne !

C'est une liberté, et une sécurité. » Sous réserve de se laisser conduire. Au chien guide, « on lui donne tout, on a une totale confiance ! Quand j'ai eu mon premier chien, ma mère nous suivait partout. Et un jour, elle a dit : "C'est bon, je peux lui faire confiance". »

Une victoire pour Marie-Noëlle, ses proches. Et son chien-guide.

par Hélène HARBONNIER